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No Sex Club

Bonjour tout le monde. J’espère que vous allez tous bien et que vous passez un agréable weekend. Ici, le soleil est revenu, cela fait donc du bien après le temps nuageux et la pluie qu’on a eut la semaine dernière. Je sais toutefois qu’on ne doit pas se plaindre, quand on voit ce qu’il se passe dans le sud et les températures qu’ils ont. De toute manière, l’été n’est pas encore terminé.

Ceci ne m’empêche pas de vous parler aujourd’hui d’un roman pour adolescents qui se déroule pendant la période scolaire. Ce n’est pas parce que ce sont les vacances qu’il faut échapper à la rentrée des classes, qu’on voit partout dans les magasins. Le roman dont je vais vous parler aujourd’hui s’intitule No Sex Club, et est donc à destination des adolescents, plutôt des lycéens quand même. Il est écrit par Betty Piccioli, dont j’ai déjà lu les autres titres, comme la duologie Chromatopia, le tome 1 et le tome 2, ou Panique à Gémélia, dont vous pouvez retrouver les chroniques sur le blog. No Sex Club est sorti en juin 2023 aux éditions Slalom. Je remercie d’ailleurs ces derniers de m’avoir permise de lire ce roman en service presse numérique via la plateforme NetGalley. Voici son résumé :

Alan et Tilda en sont persuadés : ils sont les derniers des terminales à être vierges et cela n’aide pas à faire grimper leur côte de popularité. Tout le monde ne parle que de sexe au lycée. Mais l’arrivée d’Acerola, une nouvelle élève qui affiche avec assurance le drapeau de la fierté asexuelle, va tout changer.

Ensemble ils créent le No Sex Club. Le succès est immédiat mais leur échappe rapidement : aux questions de consentement et de liberté de choix succèdent les appels à l’abstinence. Deux clans s’affrontent. L’amitié entre Alan, Tilda et Acerola se fissure… Tous vont devoir apprendre à s’écouter et à se respecter pour échapper aux injonctions qui pèsent sur chacun d’entre eux.

Dans cette histoire, nous suivons principalement deux personnages, qui sont donc Alan et Tilda. Ce sont eux qui racontent l’histoire. Ce sont deux lycéens qui entrent en première. Et comme pour tous les lycéens, selon eux, ils sont obsédés par le fait d’être toujours vierges. Or, voilà qu’à la rentrée, une nouvelle élève arrive dans leur classe. Il s’agit d’Acérola, qui assume complètement le fait de se revendiquer acéromantique. Elle va apprendre beaucoup aux deux adolescents. Mais voilà, Alan, pendant un cours, cède à l’angoisse d’être toujours vierge, et décide de lancer le No Sex Club, un club pour évoquer sa sexualité sans être jugé, et il entraîne les deux filles dans son idée. Ils ne savent pas alors que ce lieu va changer leur vie, et leur lycée.

Je vais commencer cette chronique par vous parler du thème en lui-même de ce récit. Comme l’autrice le met à la fin, elle a écrit ce roman pour l’adolescente qu’elle était à l’époque, qui aurait adoré avoir ce livre entre les mains. Je comprends ce ressenti, car on écrit souvent des histoires qu’on aurait aimé lire, et je dois avouer que j’aurais aimé avoir aussi un tel ouvrage lorsque j’étais plus jeune. En effet, ce roman parle de sexe, mais pas comme on peut le faire dans d’autres ouvrages. Ici, on privilégie à la fois le côté éducation, en rappelant les MST et tout ce qui peut être engendré par le sexe, mais surtout, le plus important, chacun a sa sexualité, et rien ne doit être forcé. On a ainsi un livre qui nous rappelle que chacun avance à son rythme, et qu’il ne faut jamais se forcer pour faire plaisir aux autres. Que notre corps, c’est d’abord le nôtre, et qu’on a le droit de refuser certaines choses. L’idée du consentement est donc largement évoquée, et j’ai vraiment trouvé cela intéressant et important. Ainsi, ce roman rappelle également la pression que tous les adolescents ressentent, celle de ne pas correspondre à un moule, celle de ne pas ressembler aux autres. Or, dans l’esprit de nos personnages, tout le monde a déjà expérimenté les rapports sexuels, et ils vont découvrir que ce n’est qu’une image qu’ils se font. Cet ouvrage rappelle alors que la société joue un rôle dans cet apprentissage, et qu’en ne cessant de répéter que les jeunes regardent du porno, ou en mettant le sexe autant en valeur, cela crée des complexes pour les adolescents qui ne se retrouvent pas dans cette idée. J’ai donc vraiment apprécié tous ces rappels, qui sont aussi bien importants à lire en tant qu’adolescents, mais aussi en tant qu’adultes. Le sexe ne devrait pas avoir une telle représentation partout. Ce qui est également plaisant, c’est qu’on a une belle représentation des différentes sexualités, avec Tilda qui est hétérosexuelle, Alan qui est gay, Acérola qui est ace, et d’autres personnages qu’on va rencontrer au cours de l’histoire. C’est un roman inclusif, avec un message qui s’adresse donc à tout le monde. De plus, on évoque aussi le problème des réseaux sociaux, avec le club qui va finir par échapper à nos héros à cause de TikTok, et le fait qu’on a affaire à des adolescents mineurs, qui ont encore besoin de l’aide des adultes, et d’être surveillés. J’ai craint, au cours de ma lecture, que cet aspect soit oublié, mais il est présent, et c’est important qu’on l’ait.

– Bien, merci d’être venus aujourd’hui. Nous avons décidé avec Alan et Tilda de créer ce club, il y a quelques jours, après avoir fait le constat que le sexe est partout dans notre société, et qu’à nos âges, nous sommes particulièrement exposés à la pression de nos pairs. Tenez, citez-moi chacun une série que vous avez vue récemment où des jeunes de nôtre âge font l’amour à l’écran.

Sex Education, propose Maëllle.

Riverdale ? enchérit Lucie.

Après elle, la liste continue : Games of Thrones, Euphoria, Elite

– En fait, nous sommes entourés par le sexe, submergés par lui, reprend-elle. Enfin, plutôt par une certaine idée du sexe, celle des médias… très hétérocentrée, très patriarcale. Ce qu’on voit dans les séries, c’est surtout le regard et les fantasmes des hommes, des réalisateurs face aux actrices souvent bien plus jeunes qu’eux. Et nous, ça nous donne des repères complètement pétés ! On appelle ça le male gaze.

Je sens comme une légère excitation parmi les gens qui l’écoutent. Même s’ils restent silencieux, ils approuvent que ce dit Acérola.

J’en arrive à présent aux personnages principaux. Ils sont donc deux, et je vais commencer par vous parler d’Alan. C’est malheureusement le personnage qui m’a le plus déçue, celui avec lequel j’ai le moins accrochée. Il m’a vraiment agacée au cours de ma lecture. En effet, on se rend compte, au début du roman, que c’est lui qui est vraiment obsédé par cette histoire de virginité, qui se met une pression terrible à cause de cela, alors même qu’il ne traîne pas avec les autres garçons. Ainsi, il fait une montagne du fait de ne pas encore avoir eu de relations, alors même qu’il n’est pas en couple. A cause de cela, il a conclu un pacte avec Tilda, qu’il n’a même pas honoré. Et cette pression qu’il se met va alors lui porter préjudice, car il va complètement perdre les pédales en plein cours et lancer le No Sex Club sans avoir l’accord de ses amies, qu’il va alors entraîner dans cette galère. Ce qui m’a alors agacée avec Alan, c’est qu’il donne l’impression de ne pas écouter les autres, de ne pas prendre en compte leurs sentiments ou leurs avis, et qu’il n’y a que lui qui compte. C’est un personnage assez égoïste, qui en plus ne va pas se remettre en question pendant une bonne partie de l’histoire. Il est alors persuadé d’avoir raison, et tant pis pour les autres. Cela ne le rend pas sympathique. Et comme les autres lui en veulent, il se retrouve un peu exclut, et il s’en plaint. Alan est une drama queen, comme il se définit, et cela lui va vraiment bien, car c’est tout à fait ça. Il ne prend pas de recul par rapport à la situation, et il entraîne les autres à sa suite. Heureusement, il finit par comprendre son erreur, ce qui permet de montrer une certaine évolution chez lui. Mais je ne me suis tout de même pas attachée à lui, et son attitude vis-à-vis de son père n’a rien arrangé. Je regrette de ne pas m’être sentie plus proche de son personnage.

– Qu’est-ce qui t’a pris ? demande finalement Acérola avec calme.

– J’en sais rien, je… J’ai complètement paniqué ! Ca m’est venu comme ça…

– Ca t’est venu comme ça de m’outer devant toute la classe ? reprend Acérola, sévère.

Elle a raison. Alan vient de révéler sa sexualité.

– Mais je… Tu en parles si ouvertement que…

– Ca ne veut pas dire que toute la classe et tous les profs sont au courant. Et puis même, tu n’avais pas le droit de te servir de cette information, Alan ! C’est intrusif et humiliant ! Il s’agit de ma vie, pas de la tienne ! Toi mieux que quiconque, tu devrais savoir qu’on ne joue pas avec l’orientation sexuelle des autres !

Alan reste silencieux, la tête baissée. il n’ose même plus la regarder en face. D’accord les garçons l’ont poussé à bout, mais quand même.. Je me sens tellement blessée et trahie.

– Et moi, tu as pensé à moi ? demandé-je simplement. Est-ce que j’avais vraiment envie que tu annonces à tout le monde que.. que je suis vierge ?

A l’inverse, j’ai beaucoup aimé le personnage de Tilda, qui est le pilier du groupe. Tilda, c’est la bonne élève, celle qui s’inquiète de ses études et de son avenir, et qui craint que le No Sex Club ne leur échappe. De ce fait, elle est assez lucide sur les risques qui peuvent leur retomber dessus. Certes, son angoisse peut parfois être lourde, mais je trouve qu’elle est alors bien contrebalancée par ce qu’elle apprend, et par sa générosité. Ainsi, Tilda fait preuve de beaucoup d’ouverture d’esprit et de remise en question. Ce qu’elle apprend au No Sex Club lui sert alors dans sa vie de tous les jours, dans la compréhension qu’elle a des autres, mais aussi d’elle-même. J’ai beaucoup aimé cet aspect de son personnage, qui montre donc son évolution et toute l’empathie qu’elle a pour les autres, notamment avec Lucie. J’ai apprécié le duo qu’elle va former avec elle, et le trio qu’elles vont former toutes les trois avec Acérola. On sent une vraie sororité entre elles, un pacte qui les inclut toutes les trois contre le reste du monde, contre la bêtise des garçons notamment. Grâce à Tilda, on en apprend ainsi plus sur ce qui est arrivé à Lucie, et on ressent, comme elle, beaucoup d’empathie pour la jeune fille. Le personnage de Lucie est alors très intéressant pour rappeler le consentement. Tilda montre alors qu’elle est prête à défendre ses amies, et même à mettre en danger son avenir. Elle va grandir grâce à toutes les expériences qui lui sont proposées. J’ai aussi apprécié le personnage d’Acérola, même si j’aurais aimé en savoir plus sur elle, sur son nom d’usage et sur le fait d’être ace. Cela m’a un peu manqué, même si Acérola n’est pas le personnage central du roman. J’espère qu’on aura donc un autre tome sur elle, pourquoi pas à l’université, ce qui nous permettrait de retrouver également Tilda. En tout cas, le trio des filles m’a beaucoup plu, et je me suis facilement attachée à elles trois.

– Il n’y a que toi qui peux savoir ce qui s’est réellement passé. Et on fera le nécessaire pour t’aider… Mais tu n’as rien à te reprocher, tu le sais ?

Lucie acquiesce puis s’essuie les yeux avec sa manche. Son mascara coule. Je sors un mouchoir de mon sac et le lui tends.

– Merci.

– Tu peux venir nous parler quand tu veux, d’accord ?

– D’accord.

Nous restons toutes les trois silencieuses un moment, à observer les feuilles des arbres danser devant nous. la plupart son tombées au sol. Je me rends compte que même la fille la plus populaire et épanouie du lycée a des doutes. Même elle subit la pression de la performance et de la sexualité. Il faut agir, et vite.

Pour ce qui est de l’écriture du roman, elle est fluide et le roman se lit très bien. On suit ainsi les séances du club et l’année scolaire. Le roman est bien construit, et on a même un peu de suspens avec l’enquête menée pour découvrir qui filme les élèves à leur insu. On a ainsi un bon dosage entre les pensées des uns et des autres et l’enquête, plus les séances du club. Tout est bien mené entre la vie de tous les jours des lycéens et les rappels éducatifs menés par l’autrice. Je regrette toutefois de ne pas avoir vraiment reconnu Nantes, et je pense que la vie au lycéen n’est pas assez représentative, mais je pinaille peut être puisque je le vois en tant qu’adulte enseignant. J’ai aussi trouvé que cette histoire de sexe correspondait plus à des collégiens, mais c’est mon avis, car il existe aussi des lycéens qui ne sont pas matures, et c’est ce qu’on retrouve ici. En tout cas, l’écriture est vraiment fluide et le roman se lit en quelques jours. C’est bien documenté, avec un vrai message.

En résumé, je ne peux que vous conseiller la lecture de ce roman. J’aurais aimé avoir un tel ouvrage lorsque j’étais plus jeune, car il a une vraie valeur éducative, en rappelant l’essentiel à la fois sur le sexe, mais aussi sur le fonctionnement des rapports amicaux et sociaux. Il rappelle l’importance du consentement, du respect et de la bienveillance qu’on doit tous avoir vis-à-vis des autres. Les personnages sont dans l’ensemble sympathiques, même si j’ai eu du mal avec celui d’Alan, qui m’a déçue. Le trio des trois filles, Acérola, Tilda et Lucie, fonctionne bien et j’ai apprécié l’énergie et la sororité qu’elles dégagent toutes les trois. C’est un roman qui se lit bien, et qui correspond aux adolescents et aux adultes. C’est une belle découverte.

Et vous ?

Avez-vous des livres que vous découvrez adultes et que vous aurez aimé lire plus jeunes ?

Qu’est-ce qui vous manquait dans les lectures de votre époque ?

Quels sont les messages que vous auriez aimé lire plus jeunes ?

Bon dimanche à tous 😀

5 réflexions au sujet de « No Sex Club »

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