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Le Royaume des trois, tome 1 : Le Joueuse de cithare

Bonjour tout le monde. J’espère que vous allez tous bien et que vous passez un excellent weekend. Pour ma part, je suis toujours dans l’attente de ce que je vais faire l’année prochaine, et j’ai aussi reçu un message de la part de l’une de mes maisons d’édition, qui ne souhaite pas publier le roman que j’avais retravaillé et envoyé la semaine dernière. C’est malheureusement une chose qui arrive, et qui fait partie du jeu.

Comme je ne me laisse pas abattre, je reviens vers vous aujourd’hui pour vous apporter une nouvelle chronique. Et cette fois, je vous emmène dans une Chine remplie de magie, une Chine plongée dans un monde de fantasy, avec le roman Le Royaume des Trois. Il s’agit d’une réécriture de la légende chinoise des Trois Royaumes. Cette réécriture nous plonge donc dans un monde magique. Le premier tome s’intitule La Joueuse de Cithare et est écrit par Joan He. Le roman est paru aux éditions Lumen en février 2023. Je remercie d’ailleurs la maison d’édition de m’avoir envoyé le roman en version numérique via la plateforme NetGalley à ce moment-là. Voici son résumé :

En l’an 414 de la dynastie Xin, le chaos règne dans un royaume divisé. Au nord, une impératrice fantoche qui n’est encore qu’une enfant, manipulée par une régente sans pitié du nom de Miasma. Au sud, une jeune reine prête à tout pour venger la mort de sa sœur aînée. Au milieu, Xin Ren, seigneuresse sans terre pourtant aimée de tout un peuple – la plus idéaliste, la seule qui reste vraiment loyale à l’empire. Mais, dans un conflit impitoyable où tous les coups sont permis, la droiture de la jeune cheffe de guerre risque bien de coûter la vie à tous ses partisans.

Leur seul rempart dans la tempête, c’est Zéphyr, l’une des plus fines stratèges du pays… La jeune fille se retrouve d’ailleurs contrainte, pour éviter un massacre, de passer à l’ennemi au moins en apparence. Elle fait la rencontre de l’énigmatique Choucas, l’un des tacticiens de la régente… Un adversaire à sa hauteur, enfin ! Saura-t-elle changer le cours entier d’une guerre en faisant des miracles pour parvenir à le manipuler ?

Car, de toutes parts, la jeune stratège est entourée d’ennemis – et tous ne sont pas humains ! Duels magiques à la cithare, amours contrariées par des allégeances contraires et amitié à la vie à la mort entre sœurs d’armes…

Dans cette histoire, nous suivons donc Zéphyr, une jeune stratège. Elle a tout abandonné pour suivre Ren, une seigneuresse de guerre, dans sa lutte de reprendre le pouvoir à la chancelière de l’empire, Miasma. Mais Ren ne se bat pas pour elle, elle le fait pour l’Impératrice, pour défendre ses valeurs et son honneur. C’est ce qui a plu à Zéphyr lorsqu’elle a décidé de la suivre. Elle ne s’attendait alors pas à découvrir sa propre identité, qu’elle avait oublié, ni à tomber amoureuse alors qu’elle se trouve en mission dans le camp ennemi. Et surtout pas à devenir l’ennemi de la plus grande déesse connue.

Je vais donc commencer cette chronique par vous parler du personnage de Zéphyr, puisqu’elle est l’héroïne principale de cette histoire. Il s’agit d’une stratège, on la découvre donc intelligente, capable d’analyse rapide, qui donnerait n’importe quoi pour sa seigneuresse, même sa vie. Zéphyr est ainsi totalement dévouée à Ren, si bien qu’on se demanderait même si elle n’est pas amoureuse d’elle. Pourquoi est-elle prête ainsi à perdre la vie pour elle ? On va le comprendre au fur et à mesure de son histoire, mais Zéphyr n’est pas totalement libre de ses choix. Son destin a été décidé à l’avance, et elle ne peut pas renier celui-ci, tout comme Ren ne pourra pas le faire avec son propre destin. Les deux femmes sont donc profondément liées. Néanmoins, au fil de la lecture, on comprend aussi que cela dépasse le destin. Zéphyr n’a pas le choix d’aider Ren, mais elle le fait volontairement, parce qu’elle se reconnaît dans ses valeurs, et parce qu’elle veut gagner. Zéphyr est assez arrogante sur ses capacités, et elle veut prouver à tous qu’elle est la meilleure. Mais, également, elle éprouve une véritable admiration pour Ren, ce qui explique qu’elle soit en mesure de la suivre, et de revenir pour elle. Zéphyr montre alors toute sa dévotion, mais aussi son courage et se détermination. Elle est prête à tout pour que Ren gagne, et même à se salir les mains. Toutefois, elle possède tout de même des faiblesses, et c’est ce qu’on va voir dans sa rencontre avec Choucas ou dans ses retrouvailles avec Kou, ou avec ses sœurs. Zéphyr paraît incapable de couper les liens avec son passé, et cela risque de lui jouer des tours par la suite, car elle perd alors en concentration. De plus, elle va tomber amoureuse de son adversaire, ce qui va la forcer à choisir entre ses sentiments et sa volonté, celle de voir Ren gagner. Avec tous ces points, j’ai donc fini par m’attacher à elle, même si ses réactions m’ont parfois fait lever les yeux au ciel car son dévouement la mène vers de grands dangers. J’avoue toutefois que la révélation qui a lieu vers le milieu du roman m’a semblé un peu tiré par les cheveux, et m’a éloignée du personnage, qui, heureusement, retrouve son intérêt ensuite. J’ai donc dans l’ensemble apprécié son personnage, même si la révélation sur sa véritable identité ne m’a pas vraiment convaincue.

« Ce n’est pas toi qui as pris la décision de servir Ren. »

« Tu n’as pas eu ton mot à dire. »

« La plus faible des seigneuresses de l’empire. »

Je serre les poings. Elle se trompe. C’est bien moi qui l’ai choisie. Elle, la seigneuresse soutenue par le peuple. La plus faible de toutes ? Rien qu’aux yeux des ignorants, comme Cigale ou Miasma. Ils se sentaient tous menacés. Je me fie à mon instinct.

Aucune destinée prédéfinie n’aurait pu m’emprisonner. Rien ne le peut. Je pivote sur mes talons et je projette un flux de ch’i sur les éclats d’argile. Je multiplie les tentatives avant de me résoudre à ce que ferait n’importe quel être humain : j’empoigne les fragments à mains nues. La glaise chauffe. L’odeur de chair brûlée est plus insoutenable encore que la douleur. Malgré tout, je tiens bon, jusqu’à ce que les fissures comment à s’élargir. J’y suis presque…

J’en arrive à présent aux personnages secondaires. Ils sont plusieurs à graviter autour de Zéphyr. Je vais commencer par vous parler de Ren. C’est la seigneuresse que cherche à défendre Zéphyr. Très occupée par le désir de justice et par l’honneur, Ren ne se bat pas pour elle, mais au nom de l’Impératrice, qu’elle souhaite libérer de Miasma, sa chancelière. Le sens de l’honneur de Ren la paralyse alors, parce qu’elle n’ose pas bouger si cela peut lui nuire, tout comme elle n’ose pas trahir les siens, alors même qu’eux la trahisse. Elle est jugée faible par ses ennemis, et l’on comprend pourquoi. Ren subit une ancienne prophétie qu’elle refuse de voir être exaucée, et elle vit dans la peur. Ce qui va arriver à Zéphyr va complètement la déstabiliser. Il existe un vrai lien entre les deux femmes, un lien d’amitié et de camaraderies, voire même peut-être plus, mais Ren ne paraît pas assez forte pour mener sa bataille jusqu’au bout sans l’aide de Zéphyr. J’avoue qu’on la voit très peu, et c’est surtout Zéphyr qui la glorifie en permanence, sans qu’on voit pourquoi. J’ai donc eu un peu de mal avec son personnage. Ensuite, nous avons Choucas, l’ennemi de Zéphyr, le stratège de Miasma. J’ai beaucoup aimé la relation qu’ils développent tous les deux. Zéphyr tombe sous son charme, et Choucas est aussi attiré par elle, sauf qu’ils sont dans deux camps différents, ennemis, et qu’ils veulent tous les deux la mort de l’autre. Tous les deux très intelligents, ils mettent donc en place des stratagèmes pour servir au mieux leurs seigneuresses. Et ils se retrouvent à travailler ensemble. On va sentir que Choucas va être déstabiliser par l’un de ses choix, et qu‘il admire beaucoup Zéphyr. Il est malade, voire mourant, et j’ai trouvé qu’on s’attachait assez facilement à lui, car il reste mystérieux, sur la défensive, mais en même temps, il protège et aide Zéphyr, il veille sur elle, ce qui est assez mignon. Il a quelques surprises en réserve, et j’ai hâte de voir l’évolution de son personnage. Il m’a aussi fait rire, car c’est un personnage qui pousse Zéphyr dans ses retranchements, et c’est amusant à voir. Enfin, nous avons le camp du Sud, avec Cigale et Kou. J’ai du mal avec ces deux personnages qui ne jouent pas franc jeu, qui cachent leurs véritables intentions. Kou est la sœur de Zéphyr, mais elle ne se comporte pas du tout comme telle, et Cigale est une vraie manipulatrice qui est finalement dangereuse, et surtout, sadique. Son personnage va sans doute poser de grosses difficultés à Zéphyr dans la suite du roman.

– Zéphyr.

– Ton vrai nom.

– C’est mon vrai nom.

– Je ne l’aime pas, commente-t-il.

Il a l’air d’un enfant qui boude, attitude qui ne lui va pas.

– Je n’aime pas « Choucas » non plus.

– Le surnom est approprié. Reconnais-le.

Je me tourne et il m’imite, si bien que nous nous retrouvons face à face. Je lui plante un doigt dans la poitrine.

– Il est approprié parce que c’est un mensonge, à ton image. Quand tu ne craches pas tes poumons, tu ressembles davantage à un paon.

– Toi aussi, réplique-t-il en m’attrapant le poignet. Est-ce qu’il ne vaudrait pas mieux que je t’appelle « Petit Paon » ?

Sa main n’est ni chaude ni froide. Juste agréablement sèche et espiègle, comme ses manières.

Parlons à présent du thème de ce roman. Nous sommes ici dans un livre qui nous parle de la guerre entre deux femmes fortes, Ren et Miasma. La première combat la deuxième au nom de son honneur, au nom de l’honneur de leur impératrice, tandis que la deuxième reste persuadée qu’elle a tous les droits en tant que chancelière, et qu’elle défend l’Empire. La grande absente, finalement, dans cette histoire, c’est l’Impératrice elle-même. On a alors le sentiment qu’elle n’existe pas, qu’elle est inutile, qu’elle ne sert à rien, alors qu’elle possède tous les pouvoirs de l’Empire. J’avoue que cela m’a assez déstabilisée, car on s’attend à la voir au moins une fois, pour qu’elle donne ses directives, pour qu’elle fasse cesser les combats, etc. J’ai encore du mal à voir son rôle dans toute cette histoire. Mais nous avons aussi le Sud, et il ne faut pas l’oublier, ce roman nous parle de la guerre des trois royaumes. Nous sommes donc là sur une guerre qui se vit aussi dans l’ombre, comme sur un échiquier où chacun place ses pions, grâce aux stratèges. J’ai apprécié cela, car on voit à quel point une guerre ne se gagne pas sur un champ de bataille, mais en choisissant le champ de bataille. On peut perdre des combats, mais certains sacrifices sont nécessaires. C’est ce que vont montrer Zéphyr, Choucas et Kou chacun à leur manière. Ce sont des décisions que n’arrive pas à prendre Ren, mais que fait Zéphyr à sa place. C’est donc intéressant de voir comment elle construit ses stratégies, comment elle les met en place, et ce qu’elle est prêt à sacrifier pour les réaliser. Nous sommes aussi sur un roman qui nous parle du poids du destin, et de la manière dont on peut essayer de s’affranchir de ce dernier. Tout a déjà été écrit à l’avance, c’est ce que va comprendre Zéphyr, mais elle veut tout de même intervenir et changer cela, quitte à se faire détruire. C’est alors assez intéressant de lire ses efforts, et je me demande où cela va nous mener. J’ai donc apprécié ma plongée dans l’univers de cette guerre chinoise, et dans la mythologie qui est mise en place pour raconter l’histoire de Zéphyr.

Moi ? Je m’efforce de faire d’une pierre deux coups. Si je peux détourner l’attention des troupes ennemis de Ren et m’assurer un passage en bateau jusqu’à Cigale, je serai à la hauteur de tous mes surnoms.

Je me penche au-dessus de la carte pour m’emparer d’un soldat d’argile que je place au point de confluence des fleuves Mica et Gypse.

– C’est évident, non ? J’amènerai la guerre dans les Terres du Sud. Même si ce territoire est loin d’être aussi faible que Ren, il paie encore le prix de sa victoire sur les pirates des Marais. Et comme le disait la secrétaire générale Prune, la cour de Cigale n’est pas épargnée par les conflits. Il lui faut encore s’assurer de ses soutiens pour que son rang de seigneuresse soit pleinement reconnue. De son côté, l’empire est au sommet de sa force, et notre chancelière a eu la sagesse de développer notre flotte. (La main en coupe, je pousse quelques maquettes de bateaux jusqu’à la ligne d’encre qui représente le fleuve Siming.) Naviguez jusqu’à la falaise et rassemblez la puissance de l’empire à la lisière des Terres du Sud. Faites-leur jurer allégeance et payer un tribut à l’impératrice Xin Bao. S’ils refusent… (Je balaie la table de mon éventail, renversant la flotte et les soldats du Sud.) Vous serez parfaitement placés pour leur faire parvenir un message.

J’en arrive enfin à l’écriture de ce roman. Nous avons clairement deux parties bien distinctes dans ce livre, et je dois avouer que, si j’ai dévoré la première, la seconde a été plus compliquée. Nous avons alors un changement qui est effectué au niveau de Zéphyr qui, pour moi, gâche un peu le personnage. Même si je comprends la volonté de l’autrice d’ajouter de la magie dans son histoire, ce qui permet d’y faire entrer cette question de destin, j’ai trouvé que ce changement était assez brutal, et m’a perturbée. Je ne m’y attendais pas, et j’ai encore du mal à voir toute la portée de ce changement. Le roman aurait pu continuer sans cela, et ça ne m’aurait vraiment pas dérangée. En fait, son intérêt est un peu limité, cela moi. Toutefois, pour ce qui est du reste de la lecture, le roman se lit bien dans l’ensemble. L’univers est assez plaisant, et assez visuel. On n’a pas beaucoup de description, mais la plume reste immersive, car on se prend au suspens du récit. Celui-ci est bien dosé, et il permet qu’on s’attache à Zéphyr, qu’on ait peur pour elle. On a envie de voir ce qui va arriver à Zéphyr, et ce qui va arriver à Ren. La lecture est agréable et le roman se lit donc bien.

En résumé, ce roman est plaisant à lire, avec une plume agréable et un vrai suspens présent. J’ai apprécié le personnage de Zéphyr, même si j’ai été déstabilisée par son évolution et la seconde partie du roman. Son adoration pour Ren est aussi un peu compliquée à comprendre, mais on s’attache à elle. J’ai bien aimé la relation qu’elle va développer avec Choucas, qui est un personnage que j’aime bien. Cette plongée dans cette grande histoire de la Chine est intéressante, et j’ai apprécié de la découvrir de cette manière. On découvre la stratégie dans l’art de la guerre, et la manière dont tout le monde avance ses pions. C’est une lecture sympathique, que je vous conseille donc si vous aimez la fantasy et la plongée dans les mythes chinois. J’ai également apprécié les thèmes développés dans le récit. C’est un premier tome sympathique à lire, et je lirais la suite avec plaisir.

Et vous ?

Qu’est-ce qui peut vous déranger dans votre lecture ?

Qu’est-ce qui peut vous donner envie de mettre un roman de côté ?

Qu’est-ce qui vous déstabiliser dans votre lecture ?

Bon dimanche à tous 🙂

10 réflexions au sujet de « Le Royaume des trois, tome 1 : Le Joueuse de cithare »

  1. J’espère que tu es moins dans l’incertitude pour l’année prochaine depuis ce billet.
    En revanche, j’ai l’impression que ce roman risque d’être juste un bon divertissement pour moi et qu’il risque de manquer de consistance par rapport à ce que je cherche et qui m’a frustrée dans d’autres lectures du même genre.
    Mais merci pour ton avis riche et éclairant !

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    1. Malheureusement non. Après, j’ai l’habitude, c’est la joie de mon statut…
      C’est possible qu’en effet, tu trouves qu’il manque de consistance… L’idée est bien, et permet de découvrir cette légende, mais en même temps, le traitement qui est fait de Zéphyr me dérange encore.
      Avec plaisir 😉

      Aimé par 1 personne

      1. C’est le problème des contractuels. Après, je sais aussi que beaucoup de TZR n’ont encore rien non plus… C’est le jeu, malheureusement. Merci beaucoup 🙂 J’espère avoir quelque chose, car c’est toujours ma crainte, et pas trop loin de chez moi pour ne pas avoir à refaire les plus de 50 km de cette année 😉

        En effet ^^ Après, c’est à voir aussi ce que cela donne dans le 2e tome. J’ai pas apprécié la manière dont ça arrive dans le 1er tome, mais ça peut changer ^^

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      2. Ahlala ça c’est la tuile… Après, j’ai déjà fait la route quotidiennement mais c’était 40 min max de chez moi. Là… Je ne sais pas ce que je répondrais à ta part ^^!
        Force à toi 😀

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