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Ils ne faisaient que rêver

Bonjour tout le monde. J’espère que vous allez tous bien et que vous passez un agréable weekend. Ici, on se prépare pour aller voter, même si finalement je vais aller toute seule, puisque mon compagnon est toujours à l’hôpital. Heureusement qu’on avait prévu le coup et préparer la procuration. En tout cas, j’ai hâte que tout ce cirque soit terminé, même si j’ai beaucoup de mal à imaginer qui sera notre prochain président. Je trouve qu’avec tous les sondages et ce que j’ai pu lire à droite et à gauche, c’est compliqué de se faire une idée. J’espère seulement que les candidats que je ne veux pas voir passer ne passeront pas.

D’ailleurs, en parlant de politique, je reviens vers vous aujourd’hui pour vous parler d’un roman hautement politique, qui fait une critique de notre rapport à l’écologie, mais aussi à la peur et au système mondial. Ce roman s’intitule Ils ne faisaient que rêver et il est écrit par Ondine Khayat. Il est sorti en mars 2022 aux éditions Charleston. Je remercie l’agence de presse Gilles Paris pour m’avoir envoyer un exemplaire en service presse. Voici le résumé de ce roman contemporain :

En Inde, face au Gange pollué, Thalie et Alisha se font une promesse du haut de leurs neuf ans : unir leurs forces pour changer le monde.

Vingt ans plus tard, à Paris, devenues de ferventes militantes écologistes, elles organisent une grande marche pour le climat. Pour la première fois, la jeunesse défile en même temps dans toutes les capitales du monde. Mais de violentes explosions anéantissent brusquement leur espoir d’un avenir meilleur.

Face à cette menace, les gouvernements prennent alors une décision radicale, celle d’entrer d’une manière inédite dans l’intimité des citoyens. Jusqu’où sont-ils prêts à aller ?

Soudain, les rêves et les promesses d’enfance deviennent plus importants que jamais.

Dans ce roman, nous suivons principalement Thalie, une jeune journaliste très engagée depuis l’enfance dans la lutte pour le climat et contre les gouvernements. Avec sa meilleure amie Alisha, les deux jeunes femmes militent avec force, et Alisha est même devenue une figure du mouvement. Mais, lorsque la marche pour le climat mondiale dégénère, tout change. Les gouvernements veulent réduire l’agressivité, et n’hésite pas à installer des puces chez les gens, dans leur organisme. Or, qui se trouve réellement derrière cette manipulation à grande échelle ?

Je vais commencer cette chronique en vous parlant, non pas des personnages principaux, mais d’abord des propos du livre. Comme je l’ai mis plus haut, nous sommes sur un ouvrage qui critique la politique et les décisions faites en son nom, et j’ai trouvé qu’il était très facile de faire un parallèle avec ce qu’il se passe dans le roman et ce qui nous est arrivé ces deux dernières années, notamment avec le passe sanitaire. Est-ce une volonté réelle de la part de l’autrice de faire ce parallèle, je l’ignore, mais c’est assez facile de voir la critique qui est faite de ce système. Bien entendu, ici on va beaucoup plus loin, car le but est d’installer des puces dans la peau des individus afin de contrôler leurs impulsivités, et les empêcher de faire du mal aux autres, tout cela dans la lutte contre le terrorisme. Les propos sont alors assez glaçants, car tout le monde est d’accord avec cette idée, justement pour éviter des attentas. Et ce roman nous interroge donc sur la perte de notre liberté afin de pouvoir se défendre, afin de pouvoir lutter contre les ennemis du monde. Et c’est aussi pour cela que le parallèle avec nos situations est frappant. Et rapidement, les dérives arrivent. En effet, cette idée de puce ne vient pas des gouvernements, mais d’une entreprise. Or, qui manipule qui ? Qui est vraiment à l’origine de ces attentats ? On nous montre aussi, dans cette histoire, à quel point il est facile de passer d’une menace à une autre. En effet, ce roman part sur l’idée de lutter pour la cause climatique, mais cette cause est totalement éclipsée par la situation et par les attentats, Au final, cela arrange aussi bien les gouvernements que les grandes entreprises, et on peut donc sentir le ras-le-bol des militants, qui voient ce pourquoi ils se sont battus, et certains sont morts, détruit et oubliés parce qu’il faut lutter contre autre chose. Ce roman est assez militant, que ce soit sur la défense de la liberté ou pour le climat, et c’est ce qui m’a plu, parce que c’était ce que j’attendais avec une telle lecture, même si je ne pensais pas qu’on basculerait sur des attentats, et que cela m’a surprise.

La suite de l’analyse des fichiers de WorldLink leur donna des précisions sur ceux que la multinationale considérait comme « utiles » : les riches, les scientifiques, les artistes, les politiques… Les inutiles comprenaient les pauvres, ceux qui ne possédaient ni de diplômes ni instruction, et qui pouvaient facilement être remplacés par des machines… WorldLink avait également répertorié les différents courants au sein du gouvernement : les « machiavéliques » qui théorisaient et étaient chargés de diffuser l’idéologie utiles/inutiles, les « idéalistes » qui croyaient à ce nouvel ordre mondiale et voyaient dans le partenariat avec WordLink une manière de créer un monde meilleur, et les « avides » qui ne cherchaient qu’à accroître leur pouvoir.

Thalie observa Jacob et les autres, quasiment tous classés inutiles ou utiles nuisibles, tout comme elle. Ceux, parmi eux, qui demeuraient « utiles » ne tarderaient sans doute pas à changer de catégorie dès que WordLink apprendrait leurs agissement contre elle. Un autre fichier révélait l’existence d’une milice privée, appartenant à WordLink, ainsi que la composition de ce qu’ils appelaient « la dissidence » : une majorité d’inutiles en rébellion contre les injections, des utiles choqués de l’idéologue de WordLink, des transfuges du gouvernement qui avaient ouvert les yeux, des transfuges de WordLink qui avaient découvert son véritable but.

Je vais à présent vous parler de l’héroïne de cette histoire, qui est donc Thalie. Dès le début, on découvre une jeune femme passionnée par son travail et par ses idées, qui veut se battre pour ces dernières, et qui ne pense pas que le pays peut tomber dans une dictature technique. Or, toutes ses certitudes volent en éclat avec les attentats auxquels elle survit, tout en étant changée. On découvre alors une jeune femme qui ne se laisse pas abattre, mais qui ferait mieux aussi de se reposer. J’avoue que je l’ai trouvée très forte, voire même un peu trop, parce qu’elle va nier sa douleur pour s’enfoncer dans le travail, ce qui n’est pas la meilleure idée. C’est d’ailleurs de cette manière qu’elle va se perdre, mais aussi trouver le moyen de tout changer. C’est alors qu’on découvre une autre facette de Thalie, qui montre que les personnes avec beaucoup d’émotions, qui peuvent être vus comme faibles ou inadaptables, peuvent aussi être les sauveurs. Thalie va découvrir qu’elle a une force qu’elle ne soupçonnait pas, et que sa douleur la protège. C’est donc un personnage que j’ai pris plaisir à suivre. J’ai vraiment aimer la voir se battre de toutes ses forces, et ne pas abandonner, et ne pas agir pour elle, mais pour tout ce en quoi elle croit, et pour les autres. C’est un vrai personnage altruiste.

– Qu’est-ce qui vous est insupportable dans ce monde ?

Thalie hésita à répondre. La douleur l’empêchait presque de respirer. Comment exprimer ce qui l’étouffait depuis toujours ?

– Tout… Les inégalités, les injustices, l’état dans lequel nous mettons la planète… Les gens vivent comme si tout cela était normal, dans l’ordre des choses. Mais je ne peux pas, moi ! Ca m’oppresse, je pourrais en mourir ! Je ne comprends même pas comment les gens continuent à avoir des enfants ! Je ne pourrais jamais en avoir dans ce monde. C’est irrespirable !

En ce qui concerne les autres personnages secondaires, ils sont un peu effacés, mais la présence d’Alisha marque tout de même beaucoup le roman. Elle est très présente, que ce soit dans les souvenirs de Thalie ou dans ses actions. C’est un personnage qu’on aurait aimé découvrir davantage, et j’avoue que je suis restée un peu sur ma faim en ce qui la concerne. D’ailleurs, une petite romance Thalie/Alisha aurait pu être agréable, même si ce n’est pas vraiment le propos du roman. Ensuite, j‘ai bien aimé le personnage de Kelly, qui arrive au cours de l’histoire. Elle aussi à des convictions, elle aussi veut aider les autres, mais elle va rapidement comprendre qu’elle est dans l’erreur. Ce qui est intéressant avec son histoire, c’est qu’on voit où certaines convictions peuvent nous mener, et qu’il faut choisir ses combats avec intelligence et surtout avec des bonnes informations. Kelly s’est fait avoir, et elle va tout faire pour changer la donne. De ce fait, elle monde, comme Thalie, qu’elle est courageuse. Elle va prendre de gros risques pour elle. J’ai apprécié la relation qui se noue entre les deux femmes, et le lien de confiance qui se met en place, alors qu’il devrait plutôt être rompu. Enfin, le personnage de Jacob est lui aussi intéressant, mais peut-être pas suffisamment exploité à mon goût. De la même manière, il semble moins courageux que les deux femmes, et plus effacé aussi, alors que c’est lui qui est à la tête de la résistance.

Une fois engagée, Kelly s’était retrouvée reléguée au sein d’exécutante des interventions que Tom lui demandait de pratiquer. Tout ce que la jeune femme avait vécu et subi durant les trois dernières années prenait soudain une signification nouvelle. Tom l’avait manipulée, flattée, humiliée, isolée, la poussant à douter de ses capacités pour neutraliser son libre arbitre et disposer d’elle à sa guise. Ses remises en question permanentes, source de souffrance depuis son enfance, s’étaient exacerbées au contact de Tom, qui avait intérêt à ce que la jeune femme s’en remette exclusivement à lui. Kelly, horrifiée, prenant conscience de l’ampleur de la manipulation qui s’était exercée à ses dépens. La honte l’envahissait à mesure que les scènes vécues remontaient à la surface avec une lucidité implacable. Elle s’était laissée faire. Comment pourrait-elle un jour se pardonner ?

En ce qui concerne l’écriture du roman, elle est fluide, mais j’aurais aimé plus de descriptions, notamment sur l’Inde, et que l’aspect climat soit aussi plus étoffé, parce qu’on part rapidement sur le problème des attentats et sur les enjeux produits ensuite par cette catastrophe. J’ai en effet trouvé qu’on oubliait le point de départ, et cela m’a un peu dérangée, parce que je croyais que c’était l’idée principale. Toutefois, c’est assez intéressant de voir ce qui peut être produit comme roman, presque de science-fiction, avec ces idées apportées par le passe sanitaire et le confinement. On sent alors l’urgence de la liberté chez Thalie, et le décalage qui va s’opérer avec les autres personnes qui sont prêtes à renoncer à tout en faveur de la sécurité. J’avoue cependant que je ne pense pas qu’on puisse mettre en parallèle la santé et la sécurité, qui sont deux choses bien différentes à mes yeux, et j’ai trouvé que, par moment, le roman allait un peu loin dans la critique, ou même dans la science-fiction, et que certains passages manquaient de crédibilité, notamment dans la deuxième partie du roman. Cependant, le romans se lit bien, et l’on prend plaisir à le lire. Il pose de bonnes questions et j’ai trouvé cela intéressant.

En résumé, c’est une lecture que je vous conseille. J’ai aimé suivre le personnage de Thalie et la voir combattre pour les valeurs qui l’habitent, et la voir vaincre sa douleur et vivre à nouveau. J’ai pris plaisir à la voir se lier d’amitié avec Kelly et se battre aux côtés de Jacob. L’aspect futuriste de ce roman peut perturber, surtout qu’on n’est finalement pas sur un roman qui parle de l’urgence climatique, mais une fois que cela est su, on rendre pleinement dans l’histoire. C’est un récit intéressant qui nous pousse à nous poser des questions sur la démocratie et sur ce qu’on veut en tant que citoyens. C’est aussi un roman sur la lutte et sur l’espoir. C’est une belle lecture, bien écrite, qui nous plonge dans un combat intéressant.

Et vous ?

Aimez-vous les histoires politiques ?

Ou, au contraire, ne supportez-vous par qu’on parle de politique dans une œuvre de fiction ?

Cela vous dérange-t-il lorsqu’on parle des événements des années précédentes ?

Ou voulez-vous oublier le confinement et la pandémie, et ses conséquences ?

Bon dimanche à tous 🙂

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