chroniques littéraires

Jusqu’à ce que ta mort nous sépare

Bonjour tout le monde. J’espère que vous allez tous bien et que vous avez passé une bonne semaine. Ici, cette dernière a été assez calme. Cela me change d’avoir des 6e à la place de mes 4e. Bon, ces derniers sont revenus hier, ils seront donc en classe demain. Il faut que je me prépare à leur retour. En attendant de retourner au travail, je vous propose aujourd’hui de vous plonger dans une de mes dernières lectures. Je vais en effet revenir avec vous sur le roman Jusqu’à ce que ta mort nous sépare, écrit par Amanda Reynolds. Ce thriller psychologique a été publié chez les éditions Mazarine en octobre 2018. Voici son résumé :


Imaginez que vous vous réveillez un matin – et que les derniers 365 jours de votre vie ont disparu. Il n’y a qu’une seule personne à qui vous faites confiance. Mais dit-elle la vérité ?

Joanne, femme au foyer de 55 ans, se réveille à l’hôpital blessée à la tête après une mauvaise chute dans l’escalier. Pourquoi ne se souvient-elle de rien,
et surtout pas de l’année passée ? Tout lui paraît étrange. Pire : son mari semble à tout prix vouloir lui cacher quelque chose, et ses enfants sont plus distants que jamais. Alors que les cauchemars se multiplient, Jo est en proie à des réminiscences : un inconnu, puis deux, hantent bientôt ses rêves. Au fil de son enquête, elle découvre avec effroi qu’il n’y a rien de plus trompeur que les apparences. Et une question la préoccupe : serait-il possible que Jo ne soit pas la mère et épouse modèle qu’elle pensait être ?

Dans cette histoire, nous suivons Joanne, que tout le monde appelle Jo. Cette mère de famille, au foyer, sans vrais amis, ne vit que pour ses deux enfants. Or, voilà que le dernier vient de partir à l’université. La maison est vide et Joanne doit se trouver des activités. Mais un jour, elle tombe dans les escaliers. Elle est persuadée qu’elle vient de déposer son fils à l’université. Seulement, un an sépare ce souvenir de la réalité. Jo a effacé de sa mémoire tout ce qui s’est déroulé l’année écoulée. Beaucoup de choses lui manquent, et elle a du mal à comprendre les réactions de ses proches, à commencer par celles de son mari qui semble lui cacher des choses. Jo va donc devoir découvrir seule ce qui s’est passé pendant cette année, afin de faire éclater la vérité et pour se reconstruire.

Je vais commencer par vous parler du personnage de Jo. On s’attache assez vite à cette femme qui a perdu une année de souvenir. Cela est très dur pour elle. Alors que l’on pourrait croire qu’elle abandonnerait la partie, qu’elle se baserait sur ce que les autres lui disent afin d’attendre que ses souvenirs refassent, ou non, surface, Jo se bat. Elle fait tout ce qui est possible pour elle afin de comprendre ce qui lui est arrivé, ce qu’elle a fait, pendant un an. C’est un geste assez courageux justement parce que cela la met en danger. Elle apprend ainsi des choses sur les autres, mais aussi sur elle, qu’elle aurait certainement préféré oublier. Or, elle tente par tous les moyens possibles de retrouver la mémoire. Malgré sa faiblesse, soit sa perte de mémoire, elle se montre forte et déterminée. Elle est réellement prête à tout pour découvrir ce qu’elle a oublié. C’est ce qui est admirable chez elle. Toutefois, certains aspects de sa personnalité m’ont déplu. Jo est en fait l’archétype de la mère possessive, qui ne laisse pas ses enfants vivre. Elle a tendance à vouloir décider du moindre aspect de leurs vies. Ainsi, lorsqu’elle apprend que sa fille aînée est en couple, elle souhaite briser ce dernier car l’homme avec qui sort Sash n’est soit-disant pas assez bien pour elle, selon le point de vue de Jo. J’ai trouvé que cet aspect-ci de sa personnalité la rendait antipathique. On est certes touché par ce qui lui arrive, par ce qu’elle découvre peu à peu sur elle-même et sur les autres, mais le fait qu’elle soit aussi directive casse un peu l’attachement que nous pouvons avoir. Personnellement, j’ai du mal à comprendre ces parents qui ne laissent pas grandir leurs enfants. C’est pour cela que je reste finalement assez mitigée sur le personnage de Jo. Certes, elle est attachante et fait preuve d’une grande force de caractère face à ce qui lui arrive, elle apprend aussi de ses erreurs, mais elle reste trop directive avec ses enfants. En fait, il y a un côté un peu pathétique chez elle car ont sent vraiment qu’elle a oublié de vivre depuis qu’elle a donné naissance à sa fille. Elle ne vit plus que pour ses enfants, elle s’est oubliée en chemin, ce qui est triste.

Quand les enfants étaient encore à la maison, j’avais une routine. Cela remonte à un certain temps, maintenant. Je la conçois, tout du moins mentalement, mais savoir que Fin est parti il y a un an ne veut pas dire que je ressens cette durée. Pour moi, c’est comme s’il venait de partir. Et Sash aussi, puisque son départ à elle a tout juste précédé celui de son frère pour l’université. Quand ils étaient plus jeunes, j’avais l’impression qu’ils passaient leur temps à se rendre à l’école et à en revenir. J’aurais voulu que ces jours passent plus vite, je maudissais le fait de ne pas avoir de temps pour moi, jamais un moment pour réfléchir. Et puis, les années ont filé comme l’éclair, l’une après l’autre, noyées dans cette routine même qui me tenait debout. Aujourd’hui, par un cruel revirement de situation, l’amnésie me vole l’année pendant laquelle j’aurais dû m’habituer à un nouveau quotidien. Dans les semaines qui ont précédé le départ de Fin pour la fac, j’ai essayé de m’imaginer bâtir une vie en dehors de mes enfants, une vie différente de l’ancienne, mais tout aussi riche. Je me demande si j’ai réussi. Si j’ai trouvé quelque chose pour combler ces absences, un relais. Une chose dangereuse, illicite. Cette pensée me terrifie. L’idée que j’ai pu mettre mon couple en danger est inconcevable.

A l’inverse, le personnage du mari de Jo, Rob, est tout de suite antipathique. On comprends immédiatement, dès le début de notre lecture, qu’il cache quelque chose à sa femme. Il n’est pas très net et c’est le personnage qu’on a tout de suite envie de détester. Ainsi, on comprend peu à peu que si Jo est toute seule, c’est de sa faute à lui. Il ne la veut que pour lui, il est très possessif. Cela ne gênait pas Jo jusqu’à ce qu’elle ait cette chute. Or, bloquée chez elle, elle se rend compte à quel point elle dépend de son mari. Ceci donne à ce dernier un côté encore plus effrayant car on s’aperçoit que c’est lui qui règne en maître sur sa maison. C’est à peine si Jo a son mot à dire. Il décide de tout, elle n’a même pas le droit d’avoir un compte à elle, sa propre carte bancaire. Je trouve cela inconcevable de nos jours, qu’une femme mariée n’ait pas de compte à elle, que cela m’a choqué. Je pense que cela démontre toute l’influence qu’a Rob sur Jo. Rob fait donc dès le début froid dans le dos et on comprend qu’il est très, trop, fusionnel avec son épouse. Il la dirige complètement. Et il fait la même chose avec le reste de sa famille. Et ce qui m’a énervé, en plus, c’est lui, c’est qu’il est persuadé que l’argent peut régler tous les problèmes. Il y a vraiment un côté manipulateur chez lui qui dérange. Il est prêt à tout pour arriver à ses fins, même à mentir. La question est alors de savoir jusqu’où il est prêt à aller. C’est vraiment un personnage pour lequel on a peu d’empathie. Je pense seulement que son personnage aurait encore pu avoir plus d’ampleur dans la vie de Jo, qu’il aurait pu encore être plus manipulateur afin d’étoffer la partie angoissante de son personnage. Je trouve qu’on ne va pas au bout de son potentiel.

Ce qu’est qu’à la fin de la commande que je prends conscience que je ne dispose pas d’un moyen de paiement indépendant. Tout est en compte joint : le compte en banque, les cartes de crédit, et Rob contrôle avec vigilance nos relevés. Mais alors que cette pensée se forme dans ma tête, une autre prend le dessus : j’ai pris une carte à mon seul nom récemment. Je prends mon portefeuille et fouille dedans, doutant aussitôt de mon souvenir : toutes les cartes sont usées, bien glissées dans les fentes de mon élégant porte-cartes en cuir. Et voilà que dans une poche à l’arrière de mon sac, fermée par une fermeture éclair, je trouve la nouvelle carte : rouge et noire, brillante. Même pas signée. Je ne me souviens ni pourquoi ni comment j’ai demandé cette carte, mais je suis sûre qu’elle n’est qu’à moi.

L’ambiance dans ce roman est très bien menée. On passe ainsi du présent, dans lequel évolue tous nos personnages, à ce qui est réellement passé. L’autrice alterne ainsi les deux points de vue, ce qui nous permet de nous apercevoir si Jo se souvient vraiment de ce qu’elle croit ou pas, si ce qu’elle pense se rappeler c’est bien passé de cette manière ou non. Il y a un petit côté angoissant dans ce roman, puisqu’on est toujours dans le doute de ce qu’a pu faire Jo, ou ce qu’ont pu lui faire ses proches. Toutefois, ce que je trouve dommage, c’est que la fin se devine trop facilement. Ainsi, on comprend presque dès le début ce qui c’est passé, pourquoi Jo est tombée dans les escaliers. Le suspens ici se trouve ailleurs, ce que je trouve un peu dommage. Je pense que l’autrice aurait pu étoffer davantage le suspens, qu’on ne devine ainsi pas aussi vite ce qui est arrivé à son héroïne, qu’on soit un peu plus dans le doute. Cela m’a un peu gâchée ma lecture même si le roman est bien écrit, bien traduit et qu’on a envie d’avoir le fin mot de l’histoire. En fait, ce qui m’a fait continuer, ce n’est pas vraiment de savoir pourquoi et comment elle était tombée, mais la manière dont elle allait découvrir la vérité, mais si elle la sait elle aussi depuis le début sans se l’avouer. Là-dessus, je trouve que c’est un bon tour de force de la part de l’autrice.

Son visage est face au mur ; dans l’ombre. Je tends la main pour le toucher, l’obliger à se tourner vers moi. Il me paraît si loin. Son corps est nu, sa peau lisse, seuls ses contours sont visibles dans la faible lumière. Je fais courir mes doigts sur son dos, l’entoure de mes bras. Son corps est chaud contre le mien. Il me touche. Je pousse un cri, mon désir est palpable. J’ai besoin de voir son visage ; de savoir qui il est. Et bien que mon mari dorme à côté de moi, je ne veux pas quitter cet homme, ouvrir les yeux et me retrouver séparée de lui. Il me touche, maintenant. M’attire contre lui, et je sens la tension entre nous. Union interdite, illicite., dangereuse. Ce n’est pas mon mari. Qui est-ce que c’était ? Une liaison, un fantôme ? Quel est ce souvenir ?

Le roman se lit donc très bien, d’ailleurs je l’ai lu en quelques jours. On est bien intégré à la vie de Jo et je pense que cela nous fait réfléchir sur la manière dont on conçoit nos couples, ce que nous sommes prêts ou non à tolérer comme pression. Même si l’on devine la fin, on a quant même envie d’aller jusqu’au bout. Le thriller psychologie est bien là, même si je pense qu’il aurait encore pu être accru, notamment avec le personnage de Rob, même si d’autres personnages gravitant autour de Jo auraient aussi pu rendre l’atmosphère plus dérangeante encore. D’une certaine manière, je pense que l’autrice ne va pas assez au bout de son idée, alors que le roman est déjà conséquent. Mais il m’a manqué quelque chose dans cette histoire, ce qui me laisse un peu sur ma fin. Je ne suis pas vraiment déçue, car j’ai aimé ma lecture, mais je pense qu’il me manque un élément, une angoisse plus prenante, pour l’apprécier totalement.

En résumé, c’est un bon thriller, j’ai pris plaisir à le lire, mais je pense qu’il aurait mérité de pousser encore plus l’aspect psychologique. On reste sur notre faim. Toutefois, je pense que cette histoire peut plaire, donc n’hésitez pas à le lire si vous aimez ce genre d’histoire. Et si vous voulez commencer à lire des thrillers dans ce style-là, ce dernier est assez soft, ce qui peut être bien pour débuter ce type d’histoires. Je le conseille donc malgré les défauts observés au cours de ma propre lecture.

Laisser un commentaire