
Bonjour tout le monde. J’espère que vous et vos proches allez tous bien, alors que l’épidémie est en train de repartir à la hausse. Ici, le moral est un peu en berne à cause d’un problème survenu sur les réseaux sociaux, et je vous avoue que j’ai bien failli mettre le blog en pause pour une durée indéterminée suite aux énièmes débats qui suscitent des polémiques en ce moment. D’ailleurs, je vous avais prévu pour aujourd’hui une toute autre chronique, qui est écrite, mais qui ne sera finalement pas publiée aujourd’hui mais un autre jour, afin de ne pas poser de nouveaux problèmes.
Aujourd’hui, j’ai donc envie de partager avec vous mon avis et ressenti sur le roman d’horreur Laisse-moi entrer. Je vous préviens tout de suite, malgré le fait qu’il soit mis sur la couverture qu’il s’agisse d’un roman d’horreur, je l’avais complètement oublié lorsque j’ai commencé ma lecture. Ainsi, je pensais qu’il s’agissait d’un polar. Ce roman est écrit par John Ajvide Lindqvist et est publié en poche aux éditions Bragelonne en mars 2020, juste avant le confinement. C’est la réédition de 2011, publié déjà chez Bragelonne. Je les remercie d’ailleurs pour l’envoie de ce roman, le blog étant partenaire des éditions Bragelonne. Si vous voulez en savoir plus sur ce roman, un film a été adapté de cette histoire. Et voici son résumé :
Oskar a 12 ans et il vit seul avec sa mère au dans une banlieue glacée de Stockholm. Solitaire et discret, martyrisé au collège, Oskar n’a d’yeux que pour sa nouvelle voisine. Elle est si différente ! La petite fille ne sort que le soir, ne craint ni le froid ni la neige, et exhale une odeur douceâtre et indéfinissable. Oskar trouvera en elle un écho à sa propre solitude et ils deviendront vite inséparables. Mais que penser des meurtres et disparitions inexplicables qui se multiplient dans le quartier depuis son arrivée ?
Dans cette histoire, nous suivons donc Oskar, un adolescent de douze ans qui vit seule avec sa mère, très protectrice, et pourtant qui le laisse faire tout ce qu’il veut. Nous sommes dans les années 80, les parents sont plus permissifs et laissent leurs enfants tranquillement jouer dedans alors que la nuit tombe. Mais voilà, une série de meurtre étrange est commise et la police enquête. Un adolescent a été vidé de son sang dans la forêt. Et d’autres personnes disparaissent. Oskar, passionné par les crimes, essaye d’en savoir plus, mais il est rapidement happé par son attirance pour Eli, sa nouvelle voisine. Or, Eli est bien mystérieuse et Oskar va commencer à se demander si la petite fille, un peu plus jeune que lui, ne serait pas liée à tous ces crimes.
Je vais commencer par vous parler d’Oskar, qui est donc le personnage principal, et celui sur lequel nous avons le plus d’informations, même après avoir terminé le roman. Oskar est un jeune adolescent pour qui la vie n’est pas facile. Sa mère a divorcé de son père, ce dernier est parti loin dans la campagne suédoise. Il vit donc seul avec elle et elle est un peu envahissante. Il faut toujours qu’elle sache tout sur son fils, tout en le laissant jouer tout seul dehors, alors que la nuit tombe. Oskar se sent étouffé et ne se confie plus. Foyer pauvre, il est aussi la risée de ses camarades de classe. Cela ne sera pas si grave si Oskar ne souffrait pas en plus d’incontinence urinaire ou si les autres ne le comparaient pas à un cochon. En fait, Oskar semble être la victime idéal de la cour de récré et cela va provoquer chez nous une certaine forme d’empathie. En effet, on regrette que ce gamin qui n’a rien demandé à personne soit traité de cette manière. On ressent donc de la pitié pour lui. Mais cette pitié est contrebalancée par le fait qu’Oskar a des envies de vengeance, et qu’il s’imagine parfaitement tuer ses camarades de classe. Il s’y entraîne d’ailleurs. De ce fait, même si on s’attache à lui en tant que victime, il paraît clair qu’Oskar peut aussi devenir le bourreau. Il le montre d’ailleurs au cours du roman, où il suit une évolution causée par Eli, un profond changement qui s’opère en lui et floute davantage les frontières entre le bien et le mal héritées de la morale. Cette évolution est intéressante car elle montre bien comment une victime, ici Oskar, peut se retourner à son tour contre ceux qui le font souffrir. Cela démontre l’attrait que peut avoir la vengeance, qui se retourne alors à la fois contre els bourreaux, mais aussi les victimes. C’est tout une réflexion qui est intéressante ici, et l’on peut s’interroger sur ce qui arrive ensuite à Oskar, sur ce qu’il a gagné et perdu à la fin de ce récit. J’ai aussi aimé l’intérêt qu’il porte à Eli, le courage qui se met en place chez lui pour l’aborder, alors qu’elle est assez farouche. Il s’attache facilement à elle, et on sent alors la pudeur des premiers émois chez Oskar, qui tombe finalement amoureux d’Eli et est prêt à la suivre partout, lorsqu’il comprend ce qu’elle est vraiment. Cela démontre alors que l’amour peut avoir des obstacles sur son chemin, et que ce n’est pas si simple de les surmonter, surtout à cet âge. Les doutes d’Oskar sont alors très importants et prouvent toute son évolution et sa réflexion sur ce qu’il fait réellement.
Le jeu avait déjà commencé. Il était un tueur en série redouté. Il avait déjà assassiné quatorze personnes avec son couteau effilé sans laisser le moindre indice. Pas un cheveu, pas un papier de bonbon. La police le craignait.
A présent, il se dirigeait vers la forêt pour choisir sa prochaine victime.
Assez bizarrement, il connaissait déjà le nom de sa victime, ainsi que son apparence. Jonny Forsberg avec ses cheveux longs et ses grands yeux méchants. Il le ferait supplier, implorer pitié et couiner comme un cochon… en vain. Le couteau aurait le dernier mot, et la terre boirait son sang.
Oskar avait lu ces mots dans un livre et ils lui plaisaient.
« La terre boira son sang. »
Il répéta ces mots tel un mantra tandis qu’il fermait à clé la porte de l’appartement et quittait la résidence, la main posée sur son couteau.
La terre boirait son sang. La terre boirait son sang.
L’issue qu’il avait utilisée en arrivant se situait à l’extrémité droite de son bâtiment mais il tourna à gauche, dépassa deux autres bâtiments et sortit par l’entrée des voitures. Quitta la zone protégée par le premier remparts. Traversa Ibsengatan et continua de descendre la côte. Quitta la zone protégée par le deuxième remparts. Poursuivit en direction de la forêt.
La terre boirait son sang.
Pour la deuxième fois de la journée, Oskar se sentait presque heureux.
Parlons maintenant justement de Eli, qui est donc l’autre personnage important de cette histoire. Si Oskar peut sembler par moment dérangeant et glauque à cause de sa fascination pour la mort et les crimes commis, pour sa vengeance, Eli est plus malsaine encore. En effet, elle a toutes les caractéristiques du personnage effrayant dont on sait qu’il ne faut pas s’approcher. Dès le début, son personnage est dérangeant et met en place une ambiance morbide dans le récit. On apprend que non seulement elle vit seule avec son père qui n’est pas son père, mais qu’elle ne sort que la nuit, qu’elle ne va pas à l’école, qu’elle parle comme si elle était une veille femme et qu’elle empeste la mort. Elle ressemble presque à un cadavre qui porte en permanence les mêmes habits. Cependant, comme toutes les petites filles, elle veut avoir des amis, et Oskar lui offre la possibilité de découvrir un nouvel univers, qu’elle ne connaît, celui de l’enfance durant les années 80. Ainsi, on découvre avec les yeux d’Eli ce qu’est le monde à ce moment-là, et on ressent aussi son décalage par rapport à Oskar. Ce qui est alors plaisant et qui fait la force de cette histoire, c’est l’amitié qui se crée entre Oskar et Eli, une amitié chargée de sentiments amoureux d’une part, de curiosité dans l’autre. Eli tente de comprendre Oskar alors que ce dernier est attiré par elle, par le mystère autour d’elle. C’est alors assez mignon la manière dont ils communiquent ensemble, celle dont ils se protègent, et les conseils qu’ils se donnent l’un à l’autre. Rapidement, Eli va pousser Oskar à se défendre face à ses agresseurs. Elle veille sur lui, non pas comme un prédateur, mais comme une amie. Ce que j’ai aussi beaucoup aimé, c’est la découverte justement de ce secret, de ce qu’est réellement Eli, non pas seulement en tant que créature, mais aussi en tant que personne. La révélation qui est alors faite est alors originale et l’on ne s’y attend pas du tout. C’est une idée très intéressante qui trouve son sens dans l’histoire d’Eli. Ce qui est aussi intéressant, c’est qu’on joue sur le fait qu’elle est une petite fille, et que cela déstabilise tout le monde, et que personne ne s’en méfie. Cela ne la rend que plus redoutable, et Eli, sous ses airs charmants, peut se révéler être un véritable monstre sanguinaire. Cela apporte une vraie dualité au personnage, qui est un prédateur, mais aussi une enfant comme les autres.
Elle tendit la main et attrapa la sienne. Il s’arrêta complètement et la regarda. Le visage d’Eli était presque complètement dans l’ombre avec les fenêtres éclairées derrière elle. Bien sûr, ce n’était que son imagination mais il eut l’impression que ses yeux brillaient. En tout cas, ils étaient la seule partie de son visage qu’il puisse clairement distinguer.
De son autre main, elle toucha sa plaie, et cette chose étrange se produisit. Quelqu’un d’autre, une personne beaucoup plus âgée et plus dure, fit son apparition sous la surface de sa peau. Un frisson parcourut le dos d’Oskar comme s’il avait croqué un glaçon.
– Oskar, ne les laisse pas faire. Tu m’entends ? Ne les laisse pas faire.
– … Non.
– Il faut que tu rendes les coups. Tu l’as jamais fait, si ?
– Non.
– Alors commence maintenant. Rends-leur leurs coups. En frappant fort.
Ce sui est intéressant dans ce roman, c’est toute l’ambiance qui se met en place. Je ne dirais pas que c’est véritablement de l’horreur, au sens où cette histoire ne m’a pas fait peur, ne m’a pas effrayée ou n’a pas provoquée de frissons chez moi, mais l’ambiance est réellement déplaisante, morbide, et malsaine. On est ici face à un roman qui joue sur les codes, qui n’a pas pour but de faire peur, mais bien d’apporter une ambiance étrange, fantastique au sens premier du terme. Le personnage d’Eli apporte beaucoup là-dessus, puisque comme je l’ai mis plus haut, il apporte une dualité où Eli est à la fois une petite fille innocente et un vrai monstre. Mais ce qui déclenche autour tout malaise, c’est la relation qu’elle entretient avec Hakan, qui n’est pas son père, mais celui qui lui amène de la nourriture, qui a tuer pour elle. Il est fasciné par elle, obnubilé même, et jaloux d’Oskar. Pour elle, il est prêt à tout, même à la mort. Et son personnage, lorsqu’il est confronté à ce choix, va devenir encore plus horrible. On sent alors toute la déchéance d’Hakan, professeur autrefois et viré suite à sa sexualité. Peut-être qu’on a ici un peu de jugement moral sur les choix d’Akan, il est possible de lire ce texte ainsi. Toutefois, sa relation conflictuelle avec Eli mène aussi à ce désastre et à ce bain de sang qui arrive. Et oui, le roman est sanglant, et l’auteur s’amuse à revisiter les codes des livres de vampires en jouant sur le véritable rôle d’Eli. Pendant toute l’histoire, on se demande si elle en est vraiment un, et l’auteur parvient alors à rendre l’histoire originale et unique. Nous ne sommes donc pas face à un simple récit de vampire ou d’horreur, mais face à un roman qui a pour but de mettre mal à l’aise, de provoquer le lecteur. C’est assez osé et cela fonctionne bien, notamment parce que tout cela est contrebalancé par la relation entre Oskar et Eli qui est pleine de douceur et de tendresse. On a donc d’un côté une histoire morbide, étrange, et d’un autre côté un récit d’amitié et de dépassement de soi. Cette dualité est intéressante à lire et montre toute la virtuosité de l’auteur qui jongle entre les deux. Ce que j’ai aussi beaucoup aimé, c’est qu’on jongle avec l’enquête policière, ce qui donne un petit côté thriller à ce roman, ce qui est sympathique. Ainsi, on a un policer qi cherche à comprendre ce qui se passe dans cette ville et qui mène son enquête, tout comme Oskar le fait lui aussi de son côté. Cet aspect-là du roman est agréable à lire, tout comme la relation entre Oskar et Eli.
Lorsqu’il se prépara pour partir, Hakan plaça le bocal à confiture dans le sac avec le reste de son matériel. Entre-temps, Eli avait passé des vêtements et l’attendait dans le couloir pour se pencher en avant et lui planter un baiser sur la joue au moment où il sortit. Hakan cligna des yeux et considéra longuement son visage.
Je suis perdu.
Puis il s’en alla accomplir sa tâche.
Dans l’ensemble, le roman se lit bien, mais j’avoue avoir eut besoin de pause pour le lire. Je ne l’ai pas dévoré d’une traite, car l’ambiance est parfois pesante. En effet, que ce soit Oskar, Eli, Hakan ou les autres personnages secondaires, ils ont tous quelque chose à caché, des problèmes dans leurs vies, ce qui les rend instable. Ils ont tous des défauts qui pèsent lourds dans l’histoire, qui leur donne une certaine forme de perversion. Les enfants ne sont pas épargnés par cela, comme en témoigne l’histoire d’Oskar et son harcèlement. Cela contribue donc à rendre l’atmosphère du récit bien étrange, si particulière. Cela ne m’a pas vraiment dérangé, mais lire autre chose à côté, de plus soft, m’a aidé à aller au bout de ma lecture. De même, il y a des passages bien sanglants, bien décrits, mais qui peuvent mettre mal à l’aise. Et surtout, j’ai eu un peu de mal avec la scène des chats. La torture animale, que ce soit en vrai, à la télévision ou dans un récit, j’ai des difficultés avec ça et cela m’a aussi marquée ici pour que j’en parle. De ce fait, ce roman nous plonge vraiment dans un univers particulier, propre à l’histoire, et c’est à mon avis ce qui contribue à l’horreur du livre. Cette horreur n’est donc pas frissonnante, mais malsaine, et c’est aussi pour cela qu’on a envie de voir jusqu’où l’auteur va aller, jusqu’où sa plume v a nous entraîner. J’ai été au bout et je ne le regrette pas, mais il n’en sera peut-être pas de même pour tous les lecteurs.
En résumé, c’est un livre dont j’ai dans l’ensemble apprécié ma lecture. J’ai trouvé l‘histoire originale, une nouvelle manière de parler des vampires tout en restant dans la même idée sanglante et perverse. Le duo Oskar/Eli fonctionne bien, et ils sont touchants tous les deux dans leur découverte l’un de l’autre, avec une amitié qui se noue et qui doute face à ce qu’est véritablement Eli. Eli apporte beaucoup à Oskar, et inversement. Ils sont assez soudés et c’est agréable de les suivre tout le long de cette aventure. Oskar a une belle évolution, il apprend à se défendre, et le fait que le thème du harcèlement scolaire soit abordé est intéressant, car cela façonne les choix d’Oskar. Le malaise est pourtant bien là avec la relation qu’entretient Eli avec Hakan, et les meurtres commis tout autour d’eux. L’horreur est alors sanglante et ne plaira peut-être pas à tout le monde, mais c’est aussi ce qui fait l’ambiance particulière de ce récit. La réflexion sur ce qui fait un monstre est ici très intéressante. J’en conseille donc la lecture aux fans du genre, et à ceux qui auraient envie d’avoir une nouvelle vision sur les vampires et autres monstres.
Et vous ?
Lisez-vous des romans d’horreur ?
Qu’aimez-vous retrouver dans ces histoires ?
Pour vous, un roman d’horreur doit-il nécessairement faire peur ?
Et comment doit-il faire peur ?
Bon dimanche à vous ?
Une réflexion au sujet de « Laisse-moi entrer »